Au bout du compte :le gagnant-gagnant

2020-04-07 16:11LUSHAYE
今日中国·法文版 2020年4期

LU SHAYE*

L'année 2019 marque le 6e anniversaire de l'initiative « la Ceinture et la Route ».Depuis six ans, cette initiative est devenue l'un des biens communs les plus populaires au monde. Et pourtant, à l'étranger, et notamment en Occident, subsistent encore nombre de malentendus et de doutes à ce sujet. Permettezmoi donc de saisir cette occasion pour faire quelques observations.

Le parc scientifique et technologique d'agriculture sino-français à Meishan,au Sichuan

On entend dire que le manque de transparence dans la co-construction de « la Ceinture et de la Route » est un moyen pour la Chine de masquer ses ambitions géopolitiques. Il me faut donc rappeler ici que « la Ceinture et la Route » est une initiative dont la vocation première est le développement. À l'origine, elle est née pour favoriser l'ouverture de l'Ouest de la Chine et permettre aux régions enclavées de l'intérieur du pays de devenir des avant-postes de l'ouverture, pour créer ainsi de nouveaux relais de croissance en faveur des économies locales. Or, il se trouve que cette initiative était parfaitement en ligne avec les besoins de coopération des pays d'Asie et d'Europe, ainsi que de nombreux pays en développement d'Asie et d'Afrique. 137 pays et 30 organisations internationales ont signé avec la Chine plus de 190 documents sur cette initiative. Selon certains, la Chine dissimulerait délibérément le contenu des documents liés à la construction conjointe de « la Ceinture et la Route ». En fait, nous n'avons rien à cacher et ces documents ne sont que des documents de principes exprimant le souhait des parties de coopérer.Peut-être que certains partenaires ne souhaitent pas les rendre publics. Mais, si un jour la Chine et la France signent un mémorandum d'entente sur l'initiative, surtout si c'est le vœu de la France, la Chine le publiera. En ce qui concerne les projets commerciaux liés à « la Ceinture et la Route »,c'est aux responsables des projets de décider des modalités de leur diffusion.

J'entends aussi des critiques sur l'initiative,l'accusant de précipiter les pays riverains dans le« piège de la dette ». Mais, ces pays sont surtout englués dans les pièges du sous-développement et de la pauvreté, et non pas dans celui de la dette. Au reste, ce sont les pays concernés et leurs peuples qui sont les mieux placés pour donner un avis sur l'initiative « la Ceinture et la Route ». Mahinda Rajapakse, premier ministre du Sri-Lanka, qui se trouve justement au cœur de la tourmente du« piège de la dette », a déclaré dans une interview le 7 décembre dernier, qu'il ne croyait pas à cette histoire de « piège de la dette ». Toute la série de grands projets de développement, y compris celui du port d'Hambantota, sont prometteurs et permettront parfaitement de rembourser les crédits qui leurs ont été alloués. Parmi les projets du Corridor économique sino-pakistanais, plus de 80 % ont été financés par des investissements directs chinois ou par des aides sans contrepartie de Chine. À peine 20 % de ces projets ont bénéficié de crédits chinois.Selon les statistiques pakistanaises, la dette liée au Corridor économique sino-pakistanais s'élèverait à 4,9 milliards de dollars, soit moins d'un dixième de la dette extérieure totale du Pakistan. À ce jour,aucun pays n'est tombé dans le « piège de la dette » à cause de sa participation à l'initiative « la Ceinture et la Route ». Bien au contraire, de nombreux pays,parce qu'ils travaillent avec la Chine et s'inspirent de ses méthodes de lutte contre la pauvreté, sont en train de sortir du « piège de la pauvreté ». Au cours des six dernières années, le commerce de marchandises entre la Chine et les pays riverains a totalisé plus de 7 500 milliards de dollars. Selon une étude de la Banque mondiale, l'initiative « la Ceinture et la Route » permettra à 7,6 millions de gens de sortir de l'extrême pauvreté et à 32 millions d'autres de sortir de la moyenne pauvreté. En outre, le volume de leurs échanges commerciaux devrait augmenter entre 2,8 % et 9,7 %.

Le 28 décembre 2019, la chaîne de production du projet de production de PVC Navoy en Ouzbékistan

Le chantier de construction de la raffinerie Azur au Koweït le 12 décembre 2019, dans le gouvernorat d'Al Ahmadi, au Koweït

D'autres encore craignent que la Chine n'utilise l'initiative que pour diviser l'UE et mieux y régner.Crainte ô combien inutile ! Pour la Chine, l'UE est un partenaire stratégique global, et non un concurrent. D'ailleurs, la Chine invite l'UE et les pays européens à participer activement à la co-construction de « la Ceinture et la Route » pour en faire une route de paix, de prospérité, d'ouverture, d'innovation, de civilisation, d'écologie et d'intégrité. Récemment,le président Xi Jinping et le premier ministre Li Keqiang, invités par les dirigeants des grandes instances européennes, Charles Michel et Ursula von der Leyen dans des entretiens téléphoniques, ont tous deux réaffirmé le plein soutien de la Chine à l'intégration européenne. Il faut dire que, parmi tous les grands acteurs mondiaux en dehors de la région, c'est la Chine qui a la politique la plus constante et la plus stable à l'égard de l'UE. Ce n'est que par un développement commun de tous les pays de l'UE qu'elle réalisera véritablement son unité et son indépendance. La Chine a toujours aidé l'UE par des actions concrètes et a toujours souhaité la renforcer en favorisant, en son sein, un développement équilibré. Ainsi, lorsque la Grèce a été frappée par la crise européenne de la dette, nous sommes venus à son secours. Réalisation majeure de l'initiative « la Ceinture et la Route », le port du Pirée est devenu aujourd'hui l'un des plus grands ports de la Méditerranée. Cette coopération Chine-PECO se poursuivra dans le cadre des relations Chine-UE.

Certains se demandent aussi quel peut bien être l'intérêt de participer à une telle initiative ? Le principal intérêt, c'est d'offrir à l'Europe davantage d'opportunités d'investissement, de marché et de coopération pour son développement. C'est aussi de pouvoir relier efficacement l'initiative avec les programmes d'investissement européens et sa Stratégie d'interconnexion eurasiatique, de faire jouer nos complémentarités et d'accélérer l'osmose entre la sphère économique asiatique et la sphère économique européenne. La ligne de chemin de fer Chine-Europe qui traverse 55 villes des 18 pays européens a déjà fait circuler sur ses voies plus de 20 000 convois. Les chiffres du Centre for Economic Policy Research (CEPR) montrent que l'amélioration des infrastructures générée par l'initiative« la Ceinture et la Route » devrait entraîner une réduction du coût des échanges mondiaux et des temps de transport, en moyenne de 2,2 % et 2,5 %.

Par ailleurs, la participation à l'initiative est utile à la défense du multilatéralisme, puisque ses principes directeurs sont la concertation, la synergie et le partage, et qu'elle incarne le concept de coopération internationale marqué par le respect mutuel, la justice, l'équité et la coopération gagnantgagnant. Elle est l'illustration d'un attachement à une économie mondiale ouverte et elle est propice à une mondialisation économique plus ouverte,plus inclusive, plus profitable, plus équilibrée et plus avantageuse pour tous. Dans le climat actuel d'unilatéralisme et de protectionnisme forcenés,construire conjointement l'initiative « la Ceinture et de la Route » est en soi l'expression d'une adhésion forte au multilatéralisme, en même temps que du souci de rechercher des pistes de réforme pour une meilleure gouvernance mondiale et pour une plus grande facilitation du commerce et de l'investissement.

La Chine et l'UE se situent aux antipodes du continent eurasiatique. Cet espace continental est d'une importance majeure au regard de la co-construction de l'initiative « la Ceinture et la Route ». Considérant l'influence grandissante de l'initiative en France et en Europe, les conditions pour des coopérations pragmatiques sont en train de mûrir. Naturellement, compte tenu des grandes différences politiques, économiques et culturelles qui existent entre la Chine et l'UE, il est normal d'avoir, çà et là, des perceptions différentes sur l'initiative « la Ceinture et la Route ». Mais l'essentiel est d'avancer sur ce qui nous rassemble, en laissant de côté nos divergences. Nous devons renforcer la confiance mutuelle et rechercher des solutions gagnantgagnant.